La Villa Valmarana ai Nani est une villa au abords de la ville de Vincenza. Le bâtiment principal a été achevé en 1670. Il est connu pour ses fresques de Giambattista et Giovanni Domenico Tiepolo et ses sculptures en pierre de nains nommés "Nani".
Photos © Luc-Henri Roger
La légende des nains de la villa Valmarana
Un gentilhomme de la région de Vicence avait une fille, Jana, au très beau visage mais au corps nain et difforme, et qu´il aimait de tout son être. L´homme, qui adorait sa fille, pour la protéger de possibles souffrances qui pourraient découler de sa difformité, fit construire cette grande villa au pied du Mont Berico, l´entourant d´une multitude de nains et naines prêts à satisfaire chaque désir de l´enfant, que de cette façon ne pouvait pas se rendre compte de sa différence, ni pouvoir rencontrer d´autres personnes que celles qui l´entouraient.
Il lui avait été entre autre interdit de se mettre à la fenêtre, et elle ne pouvait pas non plus sortir de la cage dorée que son père avait construit autour d´elle. Elle vivait dans un monde fictif, heureusement ignorante de la réalité et de ce qui se passait au dehors, sans non plus avoir jamais connu ni les joies, ni les chagrins de l´amour. Mais la jeune fille était très intelligente et de nature curieuse. Ainsi, au cours des ans, après avoir exploité à fond la bibliothéque paternelle (de laquelle avaient été éliminés tous les ouvrages qui auraient pu révéler le secret qui pesait sur sa vie), Jana décida d´expérimenter personnellement le monde, en contournant les interdictions du père.
C´est ainsi qu´un jour, déjouant la surveillance, la jeune fille se mit à la fenêtre juste au moment où un très beau garçon à cheval, un prince, passait sur la route en contrebas. Le prince s´amourachât de la beauté de ce visage, mais quand elle sortit sur la terrasse et montra son corps, le garçon fuit horrorisé. Jana appela désespérement et en vain son aimé en fuite. Ses différences émergèrent alors dans toute leur brutalité, et désespérée par son malheureux destin, la jeune fille s´ôta la vie en se jetant dans le vide.
On raconte que les petits nains, ses fidèles serviteurs, montés sur le mur de clôture pour assister aux évènements, en voyant la triste fin de leur petite maîtresse, se pétrifièrent immédiatement de douleur, et encore aujourd´hui on peut les admirer dans cette pose, telles de nombreuses sculptures décoratives, à la Villa Valmarana, connue partout comme la "Villa des nains".
Les fresques de Tiepolo
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Le sacrifice d'Iphigénie. Photo wikipedia commons. |
" La villa San-Sebastiauo, la villa Valmarana, comme on la dénomme plus souvent, se compose, à vraiment parler, de plusieurs bâtiments, le petit palais, puis la Foresteria, le logis réservé aux étrangers, auxquels une troisième villa également détachée fut encore ajoutée en 1812 par le comte Valmarana. Il n'y eut d'abord que le petit palais, une délicieuse retraite champêtre construite en 1609 par le comte Bertolo, qui devait former, avec les livres rares qu’il possédait et qu’il légua à la ville, la bibliothèque de Vicence. Il s’élevait sur une terrasse que des escaliers faisaient communiquer avec des jardins aux frais ombrages et garnis de jets d’eau. La Foresteria, élevée ensuite, était un peu plus loin. Les comtes Valmarana, qui en devinrent possesseurs en 1725, la firent restaurer et en confièrent la décoration à Tiepolo qui y vint en 1737, avec son fils et avec Mingozzi Colonna. Ils y exécutèrent des peintures .d’un admirable effet et qui se sont conservées dans tout l’éclat de leurs vives couleurs. L’œuvre principale, peinte par Tiepolo, est peut-être celle que l’on voit dans la salle à droite de l’entrée principale, le Sacrifice d’Iphigénie, une merveilleuse composition, d’un sens dramatique puissant et plus mesuré que n’en témoigne parfois le grand artiste. Dans la salle de gauche est la Flotte en Aulide et dans les autres salles des sujets tirés de l'Iliade et de l'Enéide, de la Jérusalem délivrée et de l'Orlando furioso. A la Foresteria, Tiepolo a donné libre cours à son imagination si puissante, à sa fantaisie si pleine de verve et dans les chambres de cette villa il a accumulé les sujets les plus divers et les plus opposés, peignant tantôt un Saturne ailé, tantôt des personnages chinois, des enfants nus cavalcadant sur un bâton, ou encore un Mars et une Vénus emportés sur une nuée. On ne peut imaginer une plus grande variété, un plus étrange mélange, et ces peintures, si elles étaient les seules fresques qu’eût laissées Tiepolo, suffiraient à prouver à quel degré il possédait le génie décoratif, l’entente des grandes lignes et la puissance de conception. "
in Le monde pittoresque et monumental par G. de Léris, Paris, 1889.