Le départ et le voyage en tant qu'expériences existentielles fondamentales sont au coeur d'une exposition munichoise consacrée à Max Beckmann (1884-1950). Sa vie a été marquée par des expériences tragiques de guerres et de déracinement, de transit et d'exil, mais aussi de vacances mondaines, de soif de liberté et de nostalgie du voyage, des expériences inspirées par la lecture et le mythe. Beckmann a donné à son premier triptyque le titre ambigu DEPARTURE, qui a donné son nom à la grande exposition organisée par la Pinakothek der Moderne, à mon sens une des plus meilleures expos proposée ces dernières années dans la capitale bavaroise.
Environ 70 prêts provenant d'importantes collections privées et publiques d'Europe et des États-Unis, dont les triptyques Departure du Museum of Modern Art, New York et Argonautes de la National Gallery of Art, Washington D.C., ainsi que des chefs-d'œuvre du Saint Louis Art Museum et, entre autres, de l'Institut d'histoire de l'art du Congrès américain. du Städel Museum de Francfort-sur-le-Main, de la Hamburger Kunsthalle, du Von der Heydt-Museum de Wuppertal ou du Museum der bildenden Künste de Leipzig, montrent l'énorme éventail des motifs et des idées picturales qui ont le voyage pour thème voyage et complètent le plus grand ensemble de peintures européennes de Beckmann, qui se trouve dans la collection du musée munichois.
La vie de Max Beckmann (1884-1950) a été marquée par des expériences de voyage à la fois douloureuses et agréables. D'un côté, il y a la guerre et le déracinement, le transit et l'exil, de l'autre, les voyages de vacances, la soif de liberté et la nostalgie du voyage. Le départ et le voyage en tant qu'expériences artistiques existentielles dans la première moitié du 20e siècle sont pour la première fois au centre d'une exposition consacrée à Max Beckmann. Lors de la première guerre mondiale Max Beckmann s'est engagé dans les services sanitaires de l'armée pour rapidement tomber dans une grave dépression. Novateur et inventif, son oeuvre fut taxée de dégénérée (" Entarte Kunst ") par le national-socialisme. Ce fut alors l'exil aux Pays-Bas et, pendant toute la seconde guerre mondiale, l'impossibilité d'émigrer aux États-Unis, pays qu'il ne put visiter qu'à partir de 1947 et où il décéda en 1950.
La mise en relation d'œuvres d'art avec des matériaux et des documents personnels provenant de la succession de Max Beckmann permet de découvrir l'énorme éventail des motifs et des idées picturales du voyage. Beckmann a donné à son premier grand triptyque (il en réalisa 9 au total) le titre anglais de Departure et son dernier triptyque achevé, Argonautes, est également consacré au thème du voyage dans l'art et le mythe.
Les huit chapitres de l'exposition montrent Max Beckmann en mouvement incessant, en tant que touriste des stations balnéaires et de sports d'hiver mondaines, en tant que flâneur dans les rues, en tant que client des bars, hôtels et cinémas des grandes villes ; ils montrent Beckmann, exilé à Amsterdam pendant la Seconde Guerre mondiale, fortement limité dans sa mobilité, enfin en tant que peintre célébré aux États-Unis d'Amérique, qui parcourt les paysages nouveaux pour lui avec un intérêt géologique et mythologique. Nous suivons ainsi Beckmann en tant que personne privée vers des lieux et des événements concrets lors de ses voyages, mais aussi en tant que peintre, penseur et lecteur dans son atelier pour des voyages imaginaires, métaphysiques et cosmiques. La "descente des apparences trompeuses de la vie vers les choses essentielles en soi" constituent le programme esthétique de Beckmann, dans lequel les scènes concrètes du voyage se dissolvent progressivement et se fondent en une vision picturale.
Tous les documents, photographies, livres et objets présentés dans cette exposition font partie de la succession de l'artiste aux Archives Max Beckmann des Collections Bavaroises de Peinture.
Grâce à la donation en 2015 des biens familiaux du peintre aux archives Max Beckmann des collections de peinture de l'État de Bavière, de nombreux matériaux et documents inconnus tels que des albums photos, des documents de voyage, des cartes postales et des films peuvent être présentés pour la première fois. Ils permettent de jeter un regard nouveau et actuel sur l'artiste éminent et la personne privée qu'était Max Beckmann, et donc d'organiser une exposition réalisable uniquement à Munich dans cette synthèse.
Libération et plaisir, nostalgie et mélancolie, inquiétude et peur : ces sensations ambivalentes de départs extérieurs et intérieurs caractérisent notre époque de mouvements incessants, de marché du travail mondial, de guerres, d'expulsions et de migrations. Lorsque la pandémie a rendu les voyages temporairement impossibles, leur importance s'est imposée avec force dans notre conscience. Dès la première moitié du 20e siècle, les situations de départ ne signifiaient pas seulement des moments de plaisir, mais des nécessités existentielles déclenchées par deux guerres mondiales et d'innombrables crises, qui s'accompagnaient également de la perte de la patrie, de la famille et de la langue. Max Beckmann comptait parmi les artistes visuels qui ont thématisé de manière incomparable dans leur œuvre les expériences joyeuses et douloureuses du voyage.
La scénographie de l'exposition due à une collaboration avec la conceptrice Juliette Israël est vraiment exceptionnelle. Elle a été conçue à partir des particularités des motifs et des sources matérielles : les espaces créés comportent des ouvertures et ouvrent des fenêtres vers d'autres espaces, ils invitent au mouvement et au déplacement. L'espace muséal concrétise les motifs berckmanniens du regard par la fenêtre, de l'envie de départ et de voyage, puis de la réalisation de ces désirs qui sont au coeur de son existence.
L'exposition se visite du mardi au dimanche à la Pinakothek der Moderne de Munich, jusqu'au 23 mars 2023.
Source du texte : le texte de présentation se base sur le communiqué de presse de la Pinakothek der Moderne.
Reportage photographique de Luc Roger
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