mercredi 10 janvier 2024

Vladimir Jurowski dirige Mozart, Odermatt et Schubert au Théâtre national de Munich. Le corniste Pascal Deuber héros de la soirée.

Pascal Deuber

Le directeur musical Vladimir Jurowski a dirigé pour deux représentations au Théâtre national de Munich le brillant Orchestre national de Bavière qui vient d'être désigné orchestre de l'année 2023 par les critiques du magazine Opernwelt. C'est la onzième fois que cette distinction honore l'orchestre bavarois. Torsten Kutschke, l'éditeur du magazine, a remis le certificat à l'orchestre ce dimanche en clôture de la première soirée du troisième concert d'Académie de la saison, au programme duquel figuraient la Symphonie en la majeur de Mozart et la Symphonie en ut majeur de Schubert (dite " la petite "), deux symphonies du " classicisme viennois " qui sont l'une et l'autre des oeuvres de jeunesse des deux compositeurs ( Mozart a dix-huit ans lorsqu'il la compose, et Schubert vingt-et-un ans), et le Concerto pour cor et orchestre de Gotthard Obermatt. Jeune lui aussi, — il a 31ans, — le brillantissime corniste solo suisse Pascal Deuber pour qui Gotthard Obermatt a composé son concerto, récemment créé en Roumanie à Brasov (en novembre 2023) et qui a connu ici sa première allemande.

Toute la soirée était empreinte d'une légèreté joyeuse et souriante. Vladimir Jurowski et l'orchestre de Bavière ont mis en valeur l'ampleur architecturale et la sublime élégance mélodique de la symphonie de Mozart. La gestuelle du chef est admirable : toujours précise et extrêmement attentive, tendre et ample ici, vivace et vibrante là alors que tout le corps bat le rythme. L'orchestre exprime avec talent la variété des quatre mouvements que relient des motifs sous-jacents, l'ardeur de l'allegro initial, la sérénité heureuse de l'andante, le rythme fluctuant et changeant du menuet, la fougue joyeuse du finale. Une oeuvre aux élans parfaitement jubilatoires qui n'est pas exempte de surprises.


Placée par Jurowski entre la symphonie encore classique de Mozart et celle déjà romantique de Schubert, la révélation du concerto d'Odermatt était très attendue. Gotthard Obermatt est un hautboïste, chef d'orchestre et compositeur suisse réputé. Ce fut à la fois un bonheur et une surprise de découvrir cette oeuvre contemporaine très mélodieuse dont le parcours narratif nous a paru fort bucolique, comme si nous étions entraînés dans une randonnée en montagne ou dans une partie de chasse. Les bois et les percussions sont très sollicités dans le flux chantant et joyeux de la composition qui les met en dialogue avec le cor, personnage central du concerto. Le corniste Pascal Deuber est bien connu du public munichois: corniste solo au Bayeriche Staastorchester depuis 2019, il a remporté dans sa catégorie le premier prix du concours international de musique ARD en 2021. 

Très acclamé pour la beauté de sa prestation, Pascal Deuber a encore offert un long rappel au cours duquel il a fait la démonstration de son étourdissante virtuosité et des possibilités étonnantes, et qui paraissaient sans fin, de son instrument. Il nous a interprété  Happy blues de Nagy Zsolt,  une oeuvre qui semble comme une improvisation d'une ligne mélodique aux accents afro-américains, un morceau solo mais à voix multiples : le corniste  est parvenu à exprimer les sons de différents instruments ou de différentes voix, passant de l'une à l'autre et donnant l'illusion de leur dialogue. La technique de Pascal Deuber atteint une perfection stupéfiante, c'est soufflant et décoiffant de brio et de maîtrise !

La sixième symphonie de Schubert nous fut également une découverte. L'influence de Beethoven est très perceptible dans cette " petite symphonie ", notamment dans le scherzo presto qui paraît évoquer celui de la première symphonie du grand maître. Des accents rossiniens se font également entendre dans cette oeuvre dont Schumann a dit qu'elle portait une " éternelle jeunesse ". Le maestro Jurowski propose une exécution élégante et d'une belle dynamique de cette symphonie romantique qui souligne le côté lumineux de Schubert. À la majesté du finale a répondu l'ovation enthousiaste du public.

Crédit photographique © Wilfried Hösl

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

La Sylphide dans la version de Pierre Lacotte au Ballet d'État de Bavière — Quatrième partie

Maria Taglioni (1804-84) in  La Sylphide, Souvenir d'Adieu  (6 lithographies d'Alfred-Édouard Chalon, 1845) Nous poursuivons notre e...