Une gravure représentant l'arrivée de Sissi à Kissingen à l'été 1865 fait la une du Monde illustré en juillet de la même année. Pour commenter la gravure, le magazine reproduit une lettre (non signée) d'un correspondant qui a assisté à l'arrivée de l'impératrice.
Arrivée de l'impératrice d'Autriche à Kissingen
Monsieur le Directeur, La réputation de Kissingen, justement accrue par la guérison pour ainsi dire miraculeuse de l'impératrice d'Autriche , a fait de cette ville le rendez-vous des princes et souverains, petits et grands, de l'Allemagne et de la Russie. Leur santé, voire même certains intérêts plus facilement réglés en famille que par la diplomatie, les réunissent à cette source du Rakoczy, près de laquelle ils semblent heureux de renoncer momentanément à l'étiquette pour se mêler à la foule des buveurs, composée des éléments les plus hétérogènes. — Kissingen a compté l'année dernière vingt-huit souverains ou membres de familles souveraines ; c'est un joli chiffre, et si loin qu'il soit d'y pouvoir prétendre pour cette saison, je ne crois pas hors d'à-propos de vous envoyer un croquis de l'arc de triomphe élevé ici en l'honneur de l'impératrice d'Autriche. — Partie d'Ischel hier avec son auguste époux, elle s'en est séparée le même soir à Passau pour prendre la direction de Kissingen, tandis que, de son côté, il se rendait à Carlsbad. Toute une nuit de chemin de fer ! Ce n'est pas trop mal pour une personne condamnée, il y a quatre ans, par les sommités de la science.
L'impératrice est arrivée ici de grand matin, dans un petit coupé à deux chevaux, comme une bonne bourgeoise de Francfort, accompagnée du comte et de la comtesse de Kœnigsegg-Autendorf, ses grand maître et grande maîtresse, et de deux dames d'honneur. Sans les hourras, je serais encore, vrai badaud parisien que je suis, attendant sous une pluie battante l'impérial cortège : trois voitures ressemblant à tant d'autres et un cocher à plumes, comme ils en ont tous ici, voilà qui méritait bien, en vérité, de me morfondre près de deux heures sur la grande route. C'est une leçon dont je tâcherai de profiter, si le temps n'est pas plus favorable, à l'arrivée du roi de Bavière, très-prochainement attendu. — Tout comme l'année dernière, les Français ne sont pas en nombre à Kissingen; la saison de 1864 en a compté 293, contre 439 Anglais et 730 Russes, proportion singulièrement modifiée par la mort du grand-duc. — Cruellement atteinte dans ses plus chères affections, l'impératrice de Russie passera, dit-on, en Crimée une partie de la belle saison, et le propriétaire de l'hôtel Bellevue, qu'elle devait habiter ici, vient de recevoir une indemnité de dix mille francs pour la résiliation de son marché. — Parmi les personnes marquantes, je vous citerai M. Benedetti, ambassadeur de France à Berlin; le comte de Raczinsky, membre de la haute chambre à Berlin et propriétaire d'une galerie justement célèbre ; le célèbre géologue anglais Arthur Lyell ; enfin, le comte de Borch, intendant général de tous les théâtres impériaux de la Russie.
Quant aux princes allemands, je m'y perdrais et leur nomenclature dépasserait les limites que je dois assigner à cette lettre.
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