dimanche 27 septembre 2020

Le premier séjour de Richard Wagner à Paris, c'est un roman de Balzac.

" La diligence qui l'amenait s'arrêta rue de la Jusienne "
 Un texte extrait du Richard Wagner de Gabriel Bernard*
    
    Le premier séjour de Richard Wagner à Paris, c'est un roman de Balzac.    
    Ceci n'est point une fantaisie littéraire. Nous aurons à montrer plus loin qu'un fait singulier impose cette comparaison avec une précision troublante. Mais, ce fait mis à part, nous pouvons avoir recours à l'auteur de la Comédie  humaine pour essayer de voir vivre le futur auteur de Parsifal dans le Paris de Louis-Philippe. De ce Paris, ne devons-nous pas à Balzac la plus puissante et la plus véridique synthèse? 
    Oui, pour nous faire une idée vraisemblable et vivante de Richard Wagner, musicien allemand inconnu, arrivant à Paris en septembre 1839, par la diligence, et prenant gîte dans un garni de la rue de la Tonnellerie, proche de la rue Saint-Honoré et du Marché des Innocents, lisons Balzac ! Oui, Balzac a brossé — et avec quelle vigueur! — le décor social dans lequel va évoluer, souffrir et grandir celui qui n'est encore que l'auteur des deux premiers actes de Rienzi, mais qui porte en lui déjà le Vaisseau fantôme.
Toutes les forces auxquelles se heurtera l'ambition de Wagner, nous les trouvons décrites dans l'un ou l'autre des volumes des Scènes de la Vie parisienne, et plus particulièrement dans les pages de ce chef-d'œuvre qui porte un titre si exactement et si douloureusement applicable à cette phase de la vie du musicien :  Illusions perdues !
    Mais Wagner n'est pas un Lucien de Rubempré, affligé d'une déplorable débilité de caractère. Wagner, lui, a le génie et le caractère, Et de ce Paris qui broie Rubempré, il s'évadera à temps, victorieux malgré la misère, victorieux malgré l'apparence des faits, puisque c'est à Paris qu'il aura pris conscience de ce qu'il vaut et de ce qu'il veut, puisque c'est à Paris qu'il aura renouvelé sa vision du monde et de l'art.
    La première impression de Wagner, lorsque la diligence qui l'amenait s'arrêta rue de la Jussienne, fut franchement mauvaise. Et la vue des boulevards, des «fameux boulevards », comme il dit, lui causa une désillusion.    
    Londres l'avait émerveillé, Paris le déçut.
   Les tribulations qu'il eut dès les premiers temps n'étaient guère faites pour lui inspirer l'amour de la grande ville. 
    Il était dépaysé dans le sens le plus absolu de ce  mot. Il s'exprimait difficilement dans notre langue. À chaque instant, sa vivacité naturelle se heurtait à des obstacles élémentaires ; son besoin d'expansjon était comprimé par ces incidents mesquins qui naissent sous les pas de l'étranger non encore adapté. Cette situation exaspère les natures paisibles. On imagine les ravages qu'elle produisit chez un homme tel que Wagner. Nerveux à l'excès, également prompt à la colère et à l'enthousiasme, il devait souffrir plus que tout autre de l'espèce de minorité morale en laquelle est tenu tout immigrant. [...]

* Publié à Paris chez Tallandier en 1933. Du même auteur, voir aussi nos posts Balzac avait prévu Wagner et  Le Wagner de Gabriel Bernard .

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Invitation à la lecture 

  J'invite mes lectrices et lecteurs que l'histoire des Habsbourg et des Wittelsbach passionne à découvrir les textes peu connus que j'ai réunis dans Rodolphe. Les textes de Mayerling (BoD, 2020).

Voici le texte de présentation du recueil  (quatrième de couverture):

   Suicide, meurtre ou complot ? Depuis plus de 130 années, le drame de Mayerling fascine et enflamme les imaginations, et a fait couler beaucoup d'encre. C'est un peu de cette encre que nous avons orpaillée ici dans les fleuves de la mémoire : des textes pour la plupart oubliés qui présentent différentes interprétations d'une tragédie sur laquelle, malgré les annonces répétées d'une vérité historique définitive, continue de planer le doute.
   Comment s'est constituée la légende de Mayerling? Les points de vue et les arguments s'affrontent dans ces récits qui relèvent de différents genres littéraires : souvenirs de princesses appartenant au premier cercle impérial, dialogue politique, roman historique, roman d'espionnage, articles de presse, tous ces textes ont contribué à la constitution d'une des grandes énigmes de l'histoire.

Le recueil réunit des récits publiés entre 1889 et 1932 sur le drame de Mayerling, dont voici les dates et les auteurs :

1889 Les articles du Figaro
1899 Princesse Odescalchi
1900 Arthur Savaète
1902 Adolphe Aderer
1905 Henri de Weindel
1910 Jean de Bonnefon
1916 Augustin Marguillier
1917 Henry Ferrare
1921 Princesse Louise de Belgique
1922 Dr Augustin Cabanès
1930 Gabriel Bernard
1932 Princesse Nora Fugger

Le dernier récit, celui de la princesse Fugger, amie de la soeur de Mary Vetsera, est pour la première fois publié en traduction française. Il n'était jusqu'ici accessible qu'en allemand et en traduction anglaise.

Luc-Henri Roger, Rodolphe. Les textes de Mayerling, BoD, 2020. En version papier ou ebook (ebook en promotion de lancement).

Commande en ligne chez l'éditeur, sur des sites comme la Fnac, le Furet du nord, Decitre, Amazon, etc. ou via votre libraire (ISBN 978-2-322-24137-8)



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