jeudi 30 novembre 2023

Une liseuse du 18ème siècle. Le pupitre rotatif de Marie-Caroline de Habsbourg au Palais royal de Naples.



Photos © Luc-Henri Roger

La commande de deux pupitres rotatifs fut passée par Marie-Caroline de Habsbourg en 1792 et 1794 à Giovanni Uldrich, célèbre ébéniste de Naples: Cette paire de meubles de lecture lui permettait de consulter jusqu'à huit livres en même temps.

Le précieux objet est un bureau à plateau extensible, équipé d'un pupitre avec un système d'étagères rotatives. D'un côté du plateau, lui aussi de forme classique, une manivelle en métal permet le mouvement d'une sorte de "moulin" à deux roues, auxquelles sont fixés, par des charnières réglables en laiton, huit porte-livres qui permettent la lecture simultanée de plusieurs textes. Les colonnettes qui soutiennent la grande roue centrale prennent des formes doriques et les chapiteaux des lignes classiques strictes.

Un des deux pupitres est exposé dans les salles du Palais royal de Naples.

Marie-Caroline d'Autriche vers 1790 par Élisabeth Vigée-Lebrun

Marie-Caroline de Habsbourg

Archiduchesse autrichienne, Marie-Caroline*, fille de Marie-Thérèse de Habsbourg et de François de Lorraine, naquit à Vienne le 13 août 1752, . Elle épousa par procuration Ferdinand IV de Bourbon le 7 avril 1768. Lorsqu'elle arriva à Naples, elle lisait et écrivait déjà en quatre langues : allemand, français, italien et espagnol, et savait le latin. Elle devint reine de Naples et de Sicile en 1768 et le resta jusqu'à la prise de pouvoir de Joseph Bonaparte en 1806. Elle s'exila alors en Sicile jusqu'en 1813.

* Son nom de baptême est en fait Marie-Charlotte Louise Josèphe Jeanne Antoinette d’Autriche. On l'appela Marie-Caroline après son mariage.

Les coureurs en bronze de l'Achilleion, répliques des coureurs de la Villa des Papyrus à Herculanum

[FR] Les deux sculptures en bronze des Coureurs (ou Athlètes), trouvées en 1754 lors des fouilles de la Villa des Papyrus d'Herculanum, sont conservées au Musée archéologique national de Naples (numéros d'inventaire 5626 - 5627). Elles représentent deux jeunes sportifs en action, en train de courir. Elles datent du Ier siècle av. J.-C. et mesurent 1,18 mètre de hauteur. Elle seraient inspirées d'un modèle de Lysippe ou de son école, datant du IVe siècle av. J.-C. 

L'impératrice Elisabeth d'Autriche fit en 1890 un court séjour de cinq jours à Naples. Elle y arriva le 11 novembre, visita notamment le Vésuve et les fouilles de Pompéi et Herculanum. C'est alors qu'elle décida de faire reproduire certaines statues comme les coureurs ou l'Hermès, des copies qu'elle destina à son palais de l'Achilleion. À noter qu'on a souvent désigné ces statues sous le nom de discoboles ou encore d'assaillants, alors qu'il s'agit probablement deux athlètes pris au moment du départ dans une course à pied. Les deux coureurs marquent la fin de la terrasse des muses du palais corfiote.

[IT] Le due sculture in bronzo dei Corridori (o Atleti), rinvenute nel 1754 durante gli scavi della Villa dei Papiri di Ercolano, sono oggi conservate al Museo Archeologico Nazionale di Napoli (numeri di inventario 5626 - 5627). Raffigurano due giovani sportivi in azione, in corsa. Risalgono al I secolo a.C. e sono alte 1,18 metri. Si pensa che siano stati ispirati da un modello di Lisippo o della sua scuola, risalente al IV secolo a.C.

L'imperatrice Elisabetta d'Austria fece una breve visita di cinque giorni a Napoli nel 1890. Arrivata l'11 novembre, visitò il Vesuvio e gli scavi di Pompei ed Ercolano. Fu allora che decise di far copiare alcune statue, come i corridori ed Ermes, per il suo palazzo nell'Achilleion. Va notato che queste statue sono state spesso indicate come discoboli o assalitori, mentre in realtà si tratta probabilmente di due atleti colti alla partenza di una corsa a piedi.

Terrasses de l'Achilleion à Corfou





Photos 1 à 5 © Marco Pohle

Photo 6 : photo corfiote d'époque par Borri & Figlio

Musée archéologique de Naples
Les coureurs de la villa des Papyrus à Herculanum





Photos 7 à 10 © Luc-Henri Roger
 

mardi 28 novembre 2023

L'église de Saint Jean au tombeau et son jardin à Brindisi — 14 photos

 L'église de Saint Jean au tombeau a été construite par l'ordre chevalier des Canons  Réguliers du Saint-Sépulcre avant 1128, année du premier document connu qui a donné son nom au bâtiment. Le monument constitue un témoignage clair des relations étroites entre la ville de Brindisi et la Terre Sainte pendant la période des croisades. En fait, il a été conçu comme une copie de la Rotonde du Saint-Sépulcre à Jérusalem, une ville considérée plus tard comme "ombilicus mundi " le nombril du monde. La copie a été réalisée dans une sorte de pèlerinage "virtuel" pour ceux qui n'ont pas l'occasion de voir les lieux saints en personne.


L'église est coupée à l'est par un mur droit. L'anneau central, composé de huit colonnes, est constitué d'un ensemble de colonnes incorporées dans les murs du périmètre, à travers des arcs en plein cintre. Les constructeurs ont réutilisé des chapiteaux de divers types et de différentes époques. 















Photos © Luc-Henri Roger

lundi 27 novembre 2023

Ivan Repušić dirige Ernani de Verdi en version concert au Prinzregententeater de Munich

 

Le chef Ivan Repušić © Studio Mierswa Kluska 
(via Münchner Rundfunkorchester)

Brillante représentation d'Ernani de Verdi au Théâtre du Prince Régent de Munich où l'Orchestre de la Radio de Munich donnait hier soir son deuxième concert dominical de la saison, sous la direction d'Ivan Repušić qui poursuit son cycle de plusieurs années consacré aux oeuvres du jeune Verdi, avec à la clé des enregistrements CD.

Ernani est le premier travail d'équipe de Verdi avec Francesco Maria Piave, le futur librettiste de la Traviata. L'action de cet opéra, souvent présenté comme un classique du Risorgimento qui a encouragé les efforts d'unification de l'Italie, est aussi une oeuvre complexe chargée de testostérone dans laquelle l' escalade de désirs érotiques rencontre les codes de l'honneur et de la loyauté de l'Espagne du début du 16ème siècle. Trois hommes convoitent la même femme ! Elvira n'aime que l'un d'entre eux, le séduisant rebelle Ernani, mais elle est également courtisée par le jeune roi Charles-Quint ; elle est fiancée depuis longtemps à un parent peu commode, son oncle Silva ! Tout cela est source de conflits, d'autant plus que les personnages ont été dotés par leur créateur Victor Hugo de caractéristiques contradictoires.

Pour cette version de concert, le Münchner Rundfunkorchester et son chef Ivan Repušić ont convié un plateau exceptionnel de grands chanteurs verdiens : le rôle-titre est interprété par Charles Castronovo, artiste en résidence, entouré du Carlo de George Petean et du Silva d'Ildebrando D'Arcangelo, en lutte pour Elvira, chantée par Selene Zanetti, avec en écrin l'orchestre et l'excellent choeur de la radio bavaroise entraîné par Stellario Fagone. À l'exception d'Ildobrando D'Arcangelo qui avait déjà chanté Silva à Rome il y a dix ans, tous les autres chanteurs effectuent leur prise de rôle.

C'est à Berlin que le ténor américain Charles Castronovo avait fait la connaissance d'Ivan Repušić alors qu'il chantait Don José sous sa direction. Les deux hommes sont devenus amis et c'est Ivan Repušić qui a proposé à Castronovo de venir à Munich en tant qu'artiste en résidence. Castronovo dit avoir une véritable vénération pour Verdi dont les oeuvres ont accompagné toute sa carrière. Il s'est illustré dans le rôle d'Alfredo qu'il a chanté plus de deux cents fois. Ces dernières années il s'est dirigé vers les rôles pour grand ténor lyrique, des rôles qui comportent des éléments dramatiques mais toujours dans le domaine du lyrique et du bel canto. Il considère le rôle d'Ernani comme une étape obligée sur la route qui conduit à l'interprétation de Manrico dans le Trouvère. Le ténor chante sa partie avec une énergie rayonnante et une noblesse élégante. Le timbre est d'une grande beauté, l'articulation parfaite et la ligne musicale très pure et d'une grande précision dans les différentes expressions de la palette émotionnelle complexe de son personnage. 

Selene Zanetti, qui fut membre de l'opéra studio de la Bayerische Staatsoper jusqu'en 2020,  fait ces dernières années une ascension stellaire vers le panthéon des grandes sopranos verdiennes. Elle remporta en 2016 à Barcelone le prix de la meilleure interprète de Verdi au concours de chant  Francisco Viñas. Elle a donné une Duchesse Hélène remarquée lors de la première italienne de la version originale française des Vêpres siciliennes au Teatro Massimo Palermo. Plus récemment elle a fait ses débuts en mars dernier au Staatsoper de Hambourg dans le rôle d'Amelia Grimaldi dans Simon Boccanegra. Hier soir, son Elvira a conquis le public munichois avec des aigus assurés d'une grande beauté de vocalise, un medium bien installé et de brèves descentes réussies dans les graves. Une voix puissante qui lui permet de se distinguer face à l'orchestre et au choeur et dans les ensembles, alors même qu'elle est entourée d'un trio de très grandes voix masculines. Dès sa cavatine, on est séduit par le charme irrésistible d’une voix dotée d'un timbre admirable. Elle enlève les traits de vocalise fort étendus et fort difficiles de cet aria avec une véritable maestria.

En composant son opéra, Verdi avait accordé une attention toute particulière aux voix graves, et particulièrement au registre de baryton du roi, partagé entre la violence et la tendresse. George Petean, un des plus célèbres barytons verdiens qu'on a pu entendre sur cette même scène dans Luisa Miller et Attila, se montre magistral dans les récitatifs avec un phrasé aux enchaînements particulièrement soignés. Son Don Carlo a  fait l'unanimité du public, conquis par la beauté de son timbre, la clarté de l'émission et l'éclatante facilité dans l'aigu. Ildebrando D'Arcangelo prête les profondeurs et les harmonies ténébreuses de sa voix et la richesse de son timbre au personnage de Don Ruy Gómez de Silva auquel il confère toute la noblesse altière, rigide et orgueilleuse que l'on en peut attendre. Les rôles secondaires sont fort bien distribués : Matteo Ivan Rašić en Don Riccardo, l'écuyer de Don Carlo,  Svetlina Stoyanova en Giovanna et Gabriel Rollinson en Iago font tous trois honneur aux protagonistes. 

Le chef Ivan Repušić fait lui aussi une carrière étoilée : nommé pour la saison prochaine chef d’orchestre principal de la Staatskapelle de Weimar, il dirigera la musique de l’Opéra de Leipzig à partir de la saison 2025/26. La modestie de ce chef est admirable, et n'a d'égale que son souci de rendre au mieux la rencontre de la ligne vocale avec le rythme pressant et soutenu des parties orchestrales. Il s'attache à contrôler la dynamique de l'orchestre de manière à mettre l'expressivité du chant en valeur.  Il se soustrait quasiment aux applaudissements nourris pour mieux mettre en valeur les instrumentistes de l'orchestre, les interprètes et le fameux choeur de la radio bavaroise. 

Si habilement dirigé et si magnifiquement interprété, cet opéra, qui recèle des morceaux de premier ordre, fut un ravissement et sans doute pour bon nombre de spectateurs une découverte. La délicieuse mélodie de l'air d'entrée du ténor, la cavatine d'Elvira, le premier final avec ses amples développements, le duettino des amants du deuxième acte, avec la douceur de sa cantilène et l'accompagnement de clarinette, l'élégance passionnée de l'adresse de Carlo à Elvira " Vieni meco ", le grand final "O sommo Carlo ", le trio du troisième acte, tout cela concourt à donner des lettres de noblesse au cinquième opéra de Verdi. 

L'enregistrement audio du concert est disponible en ligne sur le site de la Radio bavaroise jusqu'au 26 décembre 2023. 

Distribution 

Direction d'orchestre Ivan Repušić

Elvira - Selene Zanetti
Ernani - Charles Castronovo
Don Carlo - George Petean
Don Ruy Gómez de Silva - Ildebrando D'Arcangelo
Giovanna - Svetlina Stoyanova
Don Riccardo - Matteo Ivan Rašić
Jago - Gabriel Rollinson

Choeur de la radio bavaroise 
Münchner Rundfunkorchester

samedi 25 novembre 2023

Trois petits Cupidons batailleurs par Giuseppe Sanmartino, le fameux sculpteur du Christ voilé

Ces ravissants " Amorini in lotta " (ou " Lotta di putti ", vers 1765-1770) sont actuellement exposés au Musée de Capodimonte. Ce groupe de petits Cupidons batailleurs en marbre blanc est l'oeuvre du sculpteur napolitain Giuseppe Sanmartino (1720-1793), qui doit principalement sa renommée à la très célèbre sculpture en marbre appelée il " Cristo velato ", le Christ voilé, commandée par Raimondo di Sangro pour la chapelle Sansevero à Naples et réalisée en 1753. Ils ont l'air charmant mais observez bien la cruauté déterminée du putto central qui tente d'aveugler d'une main le petit amour terrassé, qui serre une flèche de sa petite main potelée. Le putto cruel brandit de l'autre main un arc, dont il veut sans doute frapper le putto attaqué. L'amour rend aveugle, c'est bien connu...

Les trois attributs de Cupidon, l'arc et la flèche, les fleurs et le carquois (sous le Cupidon terrassé), sont représentés mais répartis sur trois Cupidons.


Photo © Luc-Henri Roger

Je ne connaissais pas ce thème des amours batailleurs. Cherchant un peu je trouve ce tableau de Guido Reni représentant le combat de Cupidons et de putti, exposé à la galerie Doria Pamphili à Rome :

vendredi 24 novembre 2023

Coups de coeur à l'expo Oltre Caravaggio du musée de Capodimonte

L'exposition " Au-delà du Caravage. Une nouvelle histoire de la peinture à Naples" peut se visiter dans 24 salles au deuxième étage du Museo e Real Bosco di Capodimonte. L'exposition présente 200 œuvres, toutes issues des collections permanentes du musée, sans aucun prêt extérieur.

Une exposition qui vise à relancer le débat en présentant une autre lecture du XVIIe siècle napolitain, devenu pour les amateurs et les historiens le siècle du Caravage.

















Photos © Luc-Henri Roger
 

 

WACHT AUF ! Le Choeur du Festival de Bayreuth pris à la gorge.

Meistersinger 2018 - Le choeur dans la mise en scène de Barrie Kosky
© Bayreuther Festspiele / Enrico Nawrath

Plusieurs médias allemands relayent la triste nouvelle. Le Festival de Bayreuth doit faire de très grosses économies en 2024 et chaque département doit y participer. Des coupes sombres dans les effectifs du Festival devraient être réalisées. Le célèbre choeur devrait être fortement réduit. On parle de la suppression de 54 postes de choristes : l'effectif devrait passer de 134 choristes à 80. Le comité directeur du chœur et l'association des ensembles d'opéra et de danse allemands (Vereinigung deutscher Opern- und Tanzensembles / VdO) s'opposent aux coupes drastiques prévues et demandent à la direction du festival des chiffres concrets et des justifications pour cette décision : " La sonorité particulière du chœur, unique au monde, fait traditionnellement partie du festival de Bayreuth, ne peut pas être produite dans la même mesure en cas de réduction à 80 membres ".   Et partout sur les réseaux sociaux s'élève une énorme vague de protestations.

La grande scène de la prairie des Maîtres chanteurs de Nuremberg devrait-elle à l'avenir être interprétée par 54 chanteurs de moins ? " Wacht auf ! " (Réveillez-vous !) " Es nahet gen den Tag... " (Le jour est proche...) Il faut espérer des lendemains qui chantent, et que d'autres solutions de financement soient trouvées.

Guglielmo della Porta — Busto di Antinoo / Buste d'Antinoous (1575)

 



photos © Luc-Henri Roger

Admiré au musée de Capodimonte à Naples, ce buste d'Antinoüs, un bronze réalisé en 1575 selon la technique de la cire perdue par Guglielmo della Porta (1515 - 1577), le sculpteur qui réalisa son chef-d'oeuvre : le tombeau du pape Paul III dans la basilique Saint-Pierre à Rome.  

Sur la deuxième photo, on voit Lucius Verus, qui semble regretter de ne pas avoir connu l'amant de l'empereur Hadrien. Et pour cause :  Lucius Verus est né en 130, l'année de la mort d'Antinoüs, qui avait vingt ans.

La Sylphide dans la version de Pierre Lacotte au Ballet d'État de Bavière — Quatrième partie

Maria Taglioni (1804-84) in  La Sylphide, Souvenir d'Adieu  (6 lithographies d'Alfred-Édouard Chalon, 1845) Nous poursuivons notre e...