dimanche 4 octobre 2020

L'impératrice Elisabeth au regard d'Henry Bordeaux

  
  
Il y eut de tout temps de ces belles créatures insatisfaites qui ne sont bien nulle part et s’ennuient partout. Mais leur agitation s’explique par le bonheur perdu ou par l’excès du malheur. La plus célèbre fut, à la fin du siècle dernier, cette Elisabeth d’Autriche que Gabriele d’Annunzio appelle l'Impératrice errante et Maurice Barrés l'lmpératrice de la solitude. Elle avait connu, adolescente, la félicité suprême : la beauté, l’amour et la royauté. Puis elle avait été accablée par les trahisons de l’empereur et par le tragique suicide de son fils, l’archiduc Rodolphe, à Mayerling. Alors avait commencé pour elle cette fuite constante devant ses souvenirs et devant elle-même. Croisières sur l’Adriatique, à bord du yacht Miramar dont les tentes disposées avec art ne laissaient voir que la mer ; grèves de Corfou et bois d’oliviers où elle aimait à voir danser les jeunes filles grecques ; terrasse d’Hermès, temple isolé où montait le parfum des prairies ; courses, l’hiver, en traîneaux dans les pays de neige ; galops à cheval dans la puszta hongroise ; elle demandait en vain à la nature de combler son cœur vide. « Nous n’avons pas le temps d’aller jusqu’à nous, disait-elle, désabusée, tout occupés que nous sommes à des choses étrangères. Nous n’avons pas le temps de regarder le ciel qui attend nos regards. J’ai vu une fois à Tâlz une paysanne en train de distribuer la soupe aux valets. Elle n’arriva pas à remplir sa propre assiette ». Elle qui eut le temps n’arrivait pas à se connaître elle-même. Aucune plainte ne sort de sa bouche et pourtant « elle ajoute au gémissement humain, écrit Barrés, ce qu’une impératrice adulée peut ajouter d’accent blasé. ». Est-elle résignée ? Est-elle pacifiée ? « Quand on ne peut être heureux à sa guise, a-t-elle confié encore à son confident, il ne reste qu’à aimer sa souffrance. Cela seul donne le repos et le repos, c’est la beauté de ce monde ».

in Henry Bordeaux, Le premier amour de Louis XIV, un feuilleton publié dans La Revue des deux mondes en 1943.

Invitation à la lecture
    
J'invite les lectrices et lecteurs que l'histoire des Habsbourg et des Wittelsbach passionne à découvrir les textes peu connus consacrés à mon ami le prince héritier Rodolphe réunis dans Rodolphe. Les textes de Mayerling (BoD, 2020).

Voici le texte de présentation du recueil  (quatrième de couverture):

   Suicide, meurtre ou complot ? Depuis plus de 130 années, le drame de Mayerling fascine et enflamme les imaginations, et a fait couler beaucoup d'encre. C'est un peu de cette encre que nous avons orpaillée ici dans les fleuves de la mémoire : des textes pour la plupart oubliés qui présentent différentes interprétations d'une tragédie sur laquelle, malgré les annonces répétées d'une vérité historique définitive, continue de planer le doute.
   Comment s'est constituée la légende de Mayerling? Les points de vue et les arguments s'affrontent dans ces récits qui relèvent de différents genres littéraires : souvenirs de princesses appartenant au premier cercle impérial, dialogue politique, roman historique, roman d'espionnage, articles de presse, tous ces textes ont contribué à la constitution d'une des grandes énigmes de l'histoire.

Le recueil réunit des récits publiés entre 1889 et 1932 sur le drame de Mayerling, dont voici les dates et les auteurs :

1889 Les articles du Figaro
1899 Princesse Odescalchi
1900 Arthur Savaète
1902 Adolphe Aderer
1905 Henri de Weindel
1910 Jean de Bonnefon
1916 Augustin Marguillier
1917 Henry Ferrare
1921 Princesse Louise de Belgique
1922 Dr Augustin Cabanès
1930 Gabriel Bernard
1932 Princesse Nora Fugger

Le dernier récit, celui de la princesse Fugger, amie de la soeur de Mary Vetsera, est pour la première fois publié en traduction française. Il n'était jusqu'ici accessible qu'en allemand et en traduction anglaise.

Luc-Henri Roger, Rodolphe. Les textes de Mayerling, BoD, 2020. En version papier ou ebook (ebook en promotion de lancement).

Commande en ligne chez l'éditeur, sur des sites comme la Fnac, le Furet du nord, Decitre, Amazon, etc. ou via votre libraire (ISBN 978-2-322-24137-8)


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Les musiciens et Walter Scott, un article de J.G. Prod'homme

Un article du musicologue français Jacques-Gabriel Prod'homme publié le 18 septembre 1932 dans Les Dernières nouvelles de Strasbourg à l...